Le 17 janvier 2019, l’association de professionnels du document et de la gestion de l’information, Xplor France ouvrait l’année par un petit déjeuner animé par Elvire Del Fondo, fondatrice du cabinet Audigny Consulting. Au programme : recruter et manager en 2019, qui et comment ?
« Si les Ressources Humaines (RH) ne sont pas toujours un sujet au cœur des préoccupations, ce sera pourtant le sujet de l’année pour nos entreprises » nous assure notre animatrice.
Xplor rassemble la communauté du document : industriels, éditeurs, prestataires de services, donneurs d’ordre. L’association a pour but ici de partager des connaissances, réfléchir ensemble sur la gestion des talents et des compétences à l’heure où la mutation vers des supports numériques a des impacts sur le recrutement et l’accompagnement au changement. Valoriser l’humain, tel est l’enjeu!
Premier challenge : couper son téléphone et se recentrer sur l’humain
Imagine-t-on notre vie sans notre téléphone ? Et pourtant nous allons faire l’expérience de l’éteindre. Non pas juste de le mettre sur silencieux posé sur la table, mais bien de le couper complètement. Déjà les rires nerveux se font entendre. Et oui, pas évidement de s’en séparer, même un instant. Notre téléphone, ou plus précisément notre smartphone, est devenu une extension de notre être. Une forme d’intelligence auxiliaire, d’intelligence augmentée. Par ce terminal connecté, on change notre relation au monde. C’est un fait ! Mais ce n’est pas la première évolution que l’homme ait connue.
Elvire Del Fondo nous rappelle de grandes étapes que l’être humain a connu en terme d’emploi: la Renaissance, puis la Révolution Industrielle et aujourd’hui : la Mondialisation. L’entreprise devient servicielle : le client ne demande plus un produit mais aussi un service associé. Il demande à être accompagné. Et le collaborateur dans tout ça ? 98% des arrêts de travail sont dus à un dysfonctionnement managérial. Les collaborateurs sont mis dans des situations dites d’injonctions paradoxales. Faire plus avec moins, avoir le droit à la déconnexion en étant tout le temps joignable, fournir un travail de qualité le plus vite possible, être créatif sans sortir du cadre… Autant de paradoxes qui ont de quoi désarçonner plus d’un salarié. Ces demandes insoutenables finissent bien souvent par épuiser les équipes. L’occasion de remettre en cause nos pratiques RH ?
Quel constat aujourd’hui ?
Aujourd’hui il se passe quelque chose. Tout le monde s’accorde à reconnaître le phénomène qui bouleverse le recrutement : la captation des jeunes talents. Les millennials font évoluer les paradigmes en même temps qu’ils arrivent sur le marché du travail. L’acte de recrutement devient un acte de vente, de séduction. « D’où l’importance de la marque employeur ! » scande Elvire. Avec la même passion, nous abordons le sujet « l’innovation sauvera le monde ». Oui, dans quinze ans, la classe moyenne sera détruite. Il y aura les employés qualifiés et les petites mains. Il est donc primordial de réformer la formation. Drainer des fonds vers les personnes les moins qualifiées. La formation semble être le challenge numéro un des RH en 2019.
Quelle incidence sur le management ?
La première incidence est sur le contrat de travail. Avant, les entreprises étaient pensées en silos. Lorsque l’on embauchait, on allait chercher des experts spécialistes dans un domaine particulier. Aujourd’hui, les employeurs recherchent chez leurs recrues la capacité de travailler de manière transverse : création, interaction, globalité. « On a besoin les uns des autres ». Quand on recrute quelqu’un aujourd’hui, on recherche quelqu’un qui pourra participer à la réalisation d’une solution. Par ailleurs, les sociétés s’organisent autour de nouveaux pôles : on parle de mobilité, de flexibilité. Cette orientation est due aux choix de vie des collaborateurs qu’il faut désormais intégrer dans les stratégies entrepreneuriales. Par exemple, les collaborateurs ne veulent plus traverser tout Paris ou payer leur loyer une fortune dans la capitale.
Aussi, gare au syndrome franco-français de la chaise vide. En France, c’est bien connu, il faut arriver tôt le matin et partir tard le soir : montrer que l’on est là. En effet, si un employé n’est pas à son bureau, c’est qu’il ne travaille pas. Or ce manque de confiance n’est plus compatible avec les critères des jeunes générations. Premier critère : pouvoir organiser son temps de travail comme il l’entend. Et ce critère arrive bien avant le montant du salaire ! « Ils ne seraient pas un peu exigeants ces jeunes ? » entend-t-on dans la salle. Elvire nous assure que non : proposez un salaire élevé à un jeune, s’il n’adhère pas au projet de l’entreprise, s’il n’y trouve pas du sens, il ne rejoindra pas votre équipe.
Évidement, toutes ces questions amènent à la problématique de la rémunération. Combien vaut l’aide d’un collaborateur ? Comment décider combien payer les personnes qui nous fournissent une data qui nous aide à avancer plus vite ? Nous sommes face à un problème de temps, de lieu, de contenu et de rémunération. Sur une projection à cinq ans, 60% des emplois n’existent pas encore : il va falloir que l’on fasse preuve d’adaptabilité.
Et demain ?
« Ce n’est pas parce qu’il y a un babyfoot à l’accueil que l’on est plus heureux dans une entreprise ! »
Pour être heureux, il faut être bien dans sa peau, être bien équilibré entre vie privée et vie professionnelle. Elvire Del Fondo préconise de remettre les gens dans un contexte de travail sain : valoriser la personne et son travail. Redonner du sens aux entreprises, participer à un projet, expliquer aux collaborateurs ce qu’ils représentent et pourquoi ils sont indispensables. Autant d’actions à accomplir pour garantir l’employabilité de ses collaborateurs ; il en va de la responsabilité de l’employeur.
Par ailleurs, prêtons attention aux décalages qui parfois subsistent entre les RH et les Directions Générales. Y a-t-il vraiment une synergie ? Encore bien trop souvent les services RH sont considérés uniquement comme des services de paye alors que les RH ont la volonté de changer les choses, de ne plus travailler en silos. Aller dans les ateliers, comprendre les métiers, être dans une intelligence collective : c’est comprendre le besoin de travailler ensemble et l’importance à donner à chacun.