Une étude de Bpifrance Le Lab a interrogé plus de 1 800 dirigeants de PME et ETI sur leur maturité digitale. Il transparaît que la route est encore longue. Parmi les chiffres les plus marquants de cette enquête, on apprend notamment que pour 87 % des dirigeants interrogés, la transformation digitale n’est pas une priorité stratégique. Rencontre avec 3 experts qui accompagnent ces petites et moyennes entreprises vers une réflexion stratégique et une mise en œuvre de cette transformation.
Les informations que nous avons retenues de l’étude de Bpifrance Le Lab sont les suivantes :
- 47% des dirigeants de PME/ETI considèrent que l’impact du digital sur leur activité ne sera pas majeur d’ici 5 ans
- 63% n’ont pas ou peu travailler sur une feuille de route sur ce sujet
- Les 4 principaux freins évoqués : la complexité du sujet, le manque de compétences en interne, le manque de moyens financiers et la résistance au changement en interne.
Elise Tissier, Directrice de Bpifrance Le Lab fait part de son étonnement. Elle ne s’attendait pas à ce que ces chiffres soient aussi élevés.
« En menant cette étude, nous avons rencontré des dirigeants de PME qui, pour certains, n’effectuaient aucune veille – pas même sur leurs concurrents, ne faisaient partie d’aucun réseau d’entreprises et ne mettaient pas en place de partenariats ou collaborations avec leurs clients et fournisseurs. »
Les dirigeants de PME / ETI sont souvent très pris par l’opérationnel au quotidien et ne prennent pour certains pas suffisamment le temps d’échanger pour connaître ce qu’il se fait ailleurs en matière de digital.
« Pourtant, un des atouts d’une PME par rapport à un grand groupe, est la rapidité d’exécution du plan d’action lorsqu’une décision est prise en matière de transformation numérique – de part sa taille » affirme Elise Tissier.
Leur montrer ce que le digital peut leur apporter de manière concrète sur leur croissance, rentabilité et pérennité
Le langage de certains consultants formatés peut faire peur aux patrons de PME, on leur parle de chatbot, blockchain, usine 4.0, big data et autres termes très éloignés de leur réalité quotidienne. Pour Salah-Eddine Benzakour, fondateur de Puissance E, les PME doivent se concentrer sur leur boite en trouvant les outils digitaux qui permettent de régler leurs problèmes et simplifier leur processus.
« Les définitions de la transformation digitale que l’on peut voir dans la presse parfois ne sont pas claires ni précises. Voici celle que j’enseigne à mes clients PME/ETI: c’est le process d’intégration des Technologies de l’Information et de la Communication -TIC- dans l’ensemble des activités de l’entreprise afin d’optimiser le business modèle actuel de l’entreprise ou carrément le réinventer ».
Salah-Eddine Benzakour fait comprendre aux PME/ETI qu’elles peuvent faire plus avec moins grâce à la révolution numérique. Il propose notamment des programmes de formation et d’accompagnement où il va identifier quelqu’un en interne pour le former et le coacher tout en mettant en place une feuille de route. Selon lui pour augmenter les chances de réussite, la transformation digitale devrait être un processus endogène. Il s’attarde tout d’abord sur l’offre et la relation client qui est souvent l’urgence, poursuit avec la production et les datas et termine avec l’innovation produits/offres et nouveaux business modèles.
« Le but du jeu ? Une efficacité commerciale, un efficience organisationnelle et une innovation frugale » précise l’expert.
Thomas Boisson, cofondateur de l’agence Dooxy n’est pas réellement en phase avec les résultats de l’enquête. Pour lui, la maturité digitale des TPE est assez élevée.
“On constate sur le terrain qu’elles ont tout à fait conscience que si elles ne sont pas visibles sur la toile, elles ne vendront pas. Elles savent l’importance du e-commerce, du marketing, des réseaux sociaux, etc. C’est le mise en oeuvre qui semble plus compliqué ” explique t-il.
En effet, par manque de moyens financiers et de compétences internes, certaines PME se sont brûlées les doigts via des méthodes contre-productives. Il prend l’exemple d’une société qui a fait appel à une agence de communication qui leur a fait un mauvais référencement SEO. Résultats, des centaines de demandes clients à gérer mais qui ne correspondaient pas aux produits qu’ils vendaient.
“Une autre contrainte que je constate dans les PME, c’est l’état du système d’information qui est souvent bloquant à un moment donné car pas structuré. Si le CRM ou le logiciel client ne suit pas, la transformation numérique est encore plus compliquée à impulser”.