Le D&IM (Directeur & Information Manager – Directeur de l’Information et des Documents) a été initié en 2008 sous la forme d’un groupe de travail parrainé par Xplor France et l’APROGED. Le CDO (Chief Digital Officer) nous vient du monde anglo-saxon et commence à faire son nid dans l’hexagone. Nous allons nous pencher sur les points communs et les divergences qui existent entre ces deux fonctions qui accompagnent la transformation numérique des entreprises.
Le projet D&IM a pris la forme d’une association autonome en 2011, la fi-D&IM dont le but est la promotion et la reconnaissance de l’importance et de la transversalité de l’information et des documents dans les organisations.« Il est impératif de fournir aux organisations et entreprises une approche pour l’urbanisation de leurs processus documentaires. Faire converger les développements récents et très rapides des technologies numériques avec le cadre juridique, organisationnel, technique et économique qui les sous-tend, devient essentiel » indique Jean-Pierre Blanger, directeur des Offres de Services chez Ricoh France et Vice-Président de Xplor.
Même si l’appellation D&IM n’a pas réussi à émerger suffisamment, elle vit à travers d’autres postes métiers comme responsable de l’archivage, de l’information, des fonds documentaires, de la qualité, etc. Jean-Louis de la Salle, Président d’Xplor en 2008 et aujourd’hui co-fondateur et principal consultant chez IDeAs, nous explique les raisons de la nécessité de l’émergence d’une nouvelle fonction. « Dans un univers 100% papier, les choses étaient stabilisées et les organisations efficaces. L’arrivée du numérique a entrainé une certaine complexité liée à la multiplicité des supports. Alors que le CDO est purement numérique, le D&IM quant à lui possède un périmètre plus large : numérique et papier ». Mais d’autres éléments les rassemblent. Pour Jean-Louis de la Salle, il y a un rôle commun de fédérateur et de transversalité auprès des différents départements d’une entreprise. La place n’est pas forcément facile à trouver au sein de l’organisation, car ces fonctions sont parfois perçues comme des supports de services.
Pour Jean-Pierre Blanger, le D&IM est là pour optimiser les flux d’information dans l’organisation en les rationalisant pour gagner en productivité et en valeur tant patrimoniale que de communication. « Cette fonction d’excellence n’est pas accessible en début de carrière comme pourrait l’être le CDO. Au minimum, le D&IM doit avoir déjà été à la tête d’une direction opérationnelle ou fonctionnelle pour disposer d’une réelle expérience ».
D&IM | CDO | |
Présence au Comité exécutif | Oui | Oui |
Stratégie Digitale | Pas nécessairement | Oui |
Stratégie D&I | Oui | Non |
Reponsabilité multicanal/omnicanal | Oui | Pas nécessairement |
Technologue | Pas nécessairement | Plutôt |
Maîtrise de la valeur information | Oui | Pas toujours |
Valorisation du patrimoine | Oui | Non |
Priorité | Optimisation et Conformité | Innovation |
Prise de risque | Non | Oui |
Investissements à risque | Non | Oui |
Changement de business model | Pas nécessairement | Souvent |
Responsabilité en gestion de crise | Oui | Pas nécessairement |
Animation de réseaux interne | Oui | Pas nécessairement |
Responsable de roadmap | Oui – Optimisation | Oui – Innovation |
Politique de rupture | Non – Transition | Oui |
Relation à l’expérience client | Forte et opérationnelle | Forte et nouveaux champs |
Interopérabilité entre organisations | Oui | Pas nécessairement |
Conduite du changement | Oui | Pas nécessairement |
Relation au DSI | Oui – Forte | Oui |
Relation au juridique | Oui – Forte | Oui |
Relation aux métiers | Oui – Impérativement | Oui |
Relation aux clients | Oui – Pas nécessairement | Oui |
Durabilité de la fonction | Oui avec certitude | Peut-être |
Tableau réalisé par Jean-Pierre Blanger, Membre du groupe de travail D&IM.
Des fondamentaux communs : stratégie, animation de réseau, standardisation
Le D&IM accompagne la Transformation Numérique par l’optimisation des flux d’information et de documents. Le Chief Digital Officer peut prendre le sujet de la même façon même si l’on peut considérer qu’il prend plus largement le sujet quel que soit le sujet lié à la Transformation Numérique. Il peut s’agir d’un Robot, d’une monnaie numérique, d’un objet connecté, d’une API,… etc. Mais le partage est possible car les fondamentaux du D&IM sont communs à ceux du CDO : Stratégie, Animation de réseau, Standardisation, etc.
Dans CDO, il y a digital mais pas forcément transformation digitale. David Banget a rejoint l’Olympique lyonnais il y a quelques mois en tant que CDO pour diriger un nouveau pôle intitulé digital factory « Le digital était déjà clairement intégré à l’OL. Le pôle a plutôt été créé pour structurer et accélérer le processus » indique t-il. En terme opérationnel, le poste de David Banget, relié à la direction générale, se situe entre le marketing et le DSI. « Aujourd’hui, je m’occupe de quatre grands pôles : social / media, CRM / expérience utilisateur, communication / acquisition d’audience et produits /innovation ; nous avons le leadership sur la roadmap des produits digitaux ». Il y a dans cette fonction un côté créatif, innovant et prise de risque qui diffère du côté plus rationnel et plus tourné vers la gouvernance de l’information et des documents du D&IM.
Nos interlocuteurs s’accordent sur le fait que la fonction de CDO, risque de disparaître contrairement à celle de D&IM. Le digital ne doit pas être mis à part dans l’entreprise et en fera bientôt partie intégrante. « La fonction CDO se dissoudra alors dans l’organisation comme une activité ‘business as usual’ » pense Jean-Louis de la Salle. « Par contre, il sera toujours nécessaire de réguler les flux d’informations et les flux documentaires ».
Peu importe l’acronyme, l’enjeu c’est la maîtrise de la production d’informations qui compte!
Marie-Anne Chabin est expert indépendant en archivage / records management et chargée de cours à l’Université de Paris Ouest Nanterre La Défense sur ces sujets. Elle occupe également la fonction de secrétaire général du CR2PA (club des responsables de politiques et projets d’archivage). « Ce club a pour but d’aider les entreprises à maîtriser le cycle de vie de l’information lorsqu’elle est engageante. Chaque document résulte naturellement d’une activité. La question est ‘comment maîtriser sa production et le gérer dans le temps ?’ ». Pour l’expert en archivage, les appellations CDO ou D&IM sont un peu artificielles ; il ne faut pas mettre des étiquettes sur une problématique qui n’est pas forcément claire en période de transition. « La gouvernance de l’information s’articule autour de trois aspects : le contenu (collaboratif, création, connaissance), la sécurité et le cycle de vie du document qui engage dans la durée » explique t-elle. « C’est par la rencontre des métiers de la GED, de la sécurité, de l’archivage, du juridique, du financier… que va peut-être naître une nouvelle profession dont l’enjeu sera la gouvernance de l’information. Mais je pense qu’il est encore trop tôt pour le moment ».
D&IM, CDO… Peu importe l’appellation, finalement. Ce sont les fonctions d’accompagnement, de pilotage de la transformation numérique et de gouvernance de l’information sous toutes ses formes et quel que soit le canal de diffusion utilisé et des documents qui importent. Elles constituent les clés de la pérennité des entreprises privées et des organisations publiques.